Numéro 52 : Les rêves d'enfants

Octobre 2011

L'enfant dans un rêve fait en général référence à l'enfance du rêveur ou de la rêveuse. Ce symbole est donc souvent à relier aux rêves d'eau. Cependant, il se peut que le problème vienne du père. Dans ce cas, le décor du rêve ne sera pas fait d'eau, mais de symboles masculins. S'il s'agit encore d'autre chose - un traumatisme, un drame, un accident, une mort... - l'inconscient peut l'évoquer plus ou moins clairement. Je rappelle que les rêves sont d'autant plus clairs que le rêveur a parfaitement conscience du problème qui le tenaille. Simplement, il ne peut le résoudre avec ses propres forces, et son inconscient est là pour l'aider à le dépasser.

Exemple 1. Un petit enfant (souvent le fils ou la fille du sujet, quelquefois un de ses petits-enfants, selon son âge), se trouve au bord d'une piscine, (ou rivière, lac, mer, etc.). Tout à coup, l'enfant perd pied, il est en train de se noyer, le rêveur (la rêveuse) se précipite et se réveille affolé(e).

Traduction : Comme dans la série précédente, l'eau symbolise la mère du sujet : Elle le met en danger, elle le "déborde", l'étouffe dans son pouvoir maternel (les eaux matricielles). Je me suis souvent posé une question terrible : Quand cela arrive vraiment, quelle est la relation de la mère de l'enfant (ou de son père) avec sa propre mère ? Je l'ignore, car je n'ai jamais pu faire ce type d'investigation, mais je serais très intéressée de le savoir si des internautes ayant subi ce terrible drame voulaient bien me renseigner à ce sujet. Les noyades d'enfants dans les piscines sont hélas trop fréquentes. Si effectivement, la maman de l'enfant a une relation difficile (ou un manque douloureux quelquefois à cause du décès précoce de sa propre mère, quelquefois à cause d'un abandon), si effectivement on peut faire un lien entre la réalité et la situation intérieure de la maman de l'enfant (noyé, ou qui a failli se noyer...), alors, la coupure du cordon avec la génération précédente pourrait bien avoir la valeur d'une assurance efficace contre la noyade d'un enfant... Bien entendu, je le répète, ce n'est qu'une hypothèse et, comme toute hypothèse, elle doit être vérifiée avant d'être entérinée.

Restons dans le rêve : Il dit au sujet que son "reste d'enfance" se sent en danger en face de sa propre mère, qui le déborde, le "noie" sous son autorité ou ses exigences.

Exemple 2. Il y a un ou des enfants dans le rêve, avec aussi souvent un escalier, une échelle, une cave, un passage étroit. L'enfant manifeste sa souffrance par des éléments très visibles et extérieurs : pauvre, vêtements rapiécés, air misérable ou abandonné, grande tristesse dans les yeux, maigre, hâve, parfois seul dans un endroit dépouillé de tout...

Traduction. La première chose à savoir, c'est que le pluriel n'a pas dans les rêves la valeur qu'il a dans le monde extérieur. Il marque seulement l'importance du ressenti du rêveur. Dans ce cas précis, plus les enfants sont nombreux, plus le manque affectif est fortement ressenti.

Ce type de rêve est un appel au secours de cet enfant resté coincé dans l'espace intérieur du sujet. Il lui rappelle son enfance sans amour, dans la solitude affective, avec des parents qui manquent à leurs devoirs (indignes, indifférents, de toute façon inadaptés aux besoins de leur enfant). Or, qui peut venir à son secours, sinon le rêveur lui-même ? en virtuel, bien entendu ! Le test à faire immédiatement, est de reprendre les images en fermant les yeux (la visualisation), d'appeler cet enfant qu'on a été, de le prendre dans ses bras, de lui parler, de lui expliquer les choses, de le consoler et de l'aimer. On verra ce petit être se rassurer, on le sentira se blottir contre soi, on aura généralement une forte émotion. C'est du reste à l'émotion ressentie qu'on reconnaît que la traduction est juste. "Enfin quelqu'un s'occupe de moi, enfin, quelqu'un m'aime, me câline, me prend dans ses bras, enfin je peux exister dans l'amour d'un adulte..." Le but est de faire grandir ce "reste d'enfance", afin de pouvoir vivre pleinement sa vie d'adulte.

La cave est un symbole de l'utérus, l'escalier, l'échelle, le passage étroit étant autant de symboles du col de l'utérus, qui disent au sujet qu'il n'a pas encore pu en sortir, d'où le pouvoir sur lui de ses parents. Il est important de savoir que de nombreux fonctionnements dans la vie adulte sont directement liés à cet enfant en souffrance : Les comportements enfantins (collections de peluches ou de poupées), la prédilection pour des activités réservées aux enfants, le choix de professions centrées autour des enfants, comme si leur venir en aide dehors pouvait guérir celui qu'on a été autrefois et qui a manqué d'attention et d'amour. Je suis formelle, cela ne guérit pas le sujet, la seule façon de se guérir est de porter secours à cet enfant en soi. Comme il est devenu adulte, seul, cet adulte peut aller le sauver, en comprenant les rêves où il apparaît, et en le visualisant ensuite pour accélérer le travail.

Exemple 3. La rêveuse est enceinte - ou une amie à elle, ou une femme inconnue. Pour un homme cela peut être sa femme, ou même lui, car tout est possible en songe...

Traduction : Tu portes toujours en toi ce "reste d'enfance", qui te rend enceint(e) de toi-même. La solution est d'en accoucher. Quand cela est donné dans le rêve, c'est que le processus est en cours. Je précise que, lorsque c'est fait, la relation s'améliore avec la mère, c'est d'ailleurs à cela qu'on reconnaît que le processus est achevé : quand il n'y a plus de tiraillement entre les deux générations...

Je précise aussi que beaucoup de personnes en surpoids (parfois obèses) affichent par là cette "grossesse" psychique (ne dit-on pas d'une femme enceinte : elle est "grosse" ?). La libération de ce reste d'enfance, peut être un moyen efficace de perdre du poids.

CEPENDANT, si le sujet ne ressent pas ce type de traduction, il peut s'agir d'autre chose.

Première piste. Le rêveur voit ses propres parents comme des enfants. Sa mère (ou son père) est devenu(e) son enfant, il s'occupe d'elle (de lui), parfois depuis toujours ou longtemps, la (le) prend en charge. C'est la relation parent-enfant inversée, toujours malsaine, parce que contre nature. Si le rêveur le sent plus juste, le bébé de son rêve va donc mettre en scène ce parent devenu parfois incapable de rester autonome (alzheimer ou autre...). S'il ne s'agit pas d'un des parents, il peut s'agir d'un adulte qui se comporte comme un enfant (époux ou épouse) ce que le sujet supporte peut-être difficilement. Enfin, il peut s'agir aussi du fils ou de la fille (devenus adultes) mais que le rêveur continue à traiter comme de petits enfants, ce qui pollue certainement la relation. Ce qu'on doit s'accorder vis-à-vis de ses propres parents, il faut savoir l'accorder à ses propres enfants vis-à-vis de soi - et couper son cordon avec eux, tout en leur permettant de couper le leur avec soi !

Deuxième piste. Si le sujet a achevé le processus de libération par rapport à ses parents, l'enfant peut symboliser cette seconde naissance dont parle l'Evangile de Jean : "Nul ne peut être mon disciple s'il ne naît d'eau et d'esprit." Cette naissance est forcément invisible (d'esprit) et se fait dans l'inconscient (l'eau). Dans l'Evangile de Matthieu, cette seconde naissance est donnée comme un songe apprenant à Joseph la grossesse de Marie. Cela a la même valeur : Il s'agit bien de la naissance de la véritable identité d'un être humain, identité psychique, émergence de son âme, vue comme la naissance d'un petit enfant (son identité humaine à l'intérieur de lui).

Autant le premier enfant est source de terribles handicaps dans la vie de l'adulte, autant celui-ci donne force et confiance. Ce nouveau-né là parle, marche, se conduit comme un "grand". Bien qu'il ait l'innocence d'un bébé, il a la conscience d'un sage. Si le rêveur l'interroge (hors rêve), il ressentira tout l'amour que cet être porte en lui, et il sentira lui aussi un immense amour pour cet enfant (qui est lui-même, enfin libéré des limbes de l'inconscience). Je rappelle la différence entre "l'inconscient" (notre espace intérieur authentique et identitaire que nous devons investir pour devenir complets) et "l'inconscience" (l'état hélas trop fréquent de réduction dramatique de notre zone consciente, qui nous fait basculer dans des comportements inadéquats, voire inhumains).

Troisième piste. Si l'enfant du songe ne génère ni intérêt, ni amour, mais au contraire indifférence et même répulsion, il s'agit souvent de l'ego, qui maintient le sujet dans l'inconscience, dans des comportements inadaptés, cruels, imbéciles, qui dénaturent son humanité. La visualisation le fera apparaître sous son vrai jour. Pour cela, il faut douter de l'image : L'inconscient donnera alors la véritable identité de cet être démoniaque dont le but est de rester caché dans l'espace intérieur du sujet afin de mieux le tenir en laisse.

J'aurai l'occasion de reparler des symboles de l'ego, cet ennemi universel de notre humanité, qui agit souterrainement à l'intérieur de chacun d'entre nous.