Rêve 35

La situation.

Laurence a 45 ans. Elle est restée 20 ans seule, sans relation masculine, un peu repliée sur elle-même, en espérant une rencontre, sans trop y croire, au fur et à mesure que le temps passait. Puis cela a eu lieu : Elle a rencontré sur le tard un homme dont elle est tombé amoureuse et pour lequel elle a tout quitté. Elle est partie vivre chez lui, abandonnant famille, appartement, travail et amis. Ils se sont mariés et dans les trois semaines qui ont suivi, les choses se sont odieusement dégradées. Son mari s'est fermé, la communication s'est éteinte, une froideur incompréhensible pour elle s'est installée. Elle a cherché à comprendre, à s'expliquer, à reprendre une relation saine et normale - en vain. Finalement, elle a compris que, si elle restait, elle allait mourir. Or elle ne le voulait pas. Elle a donc mis ce qui lui restait d'énergie à faire son déménagement pour revenir sur Marseille. Quand elle est venue me voir, elle était rentrée depuis trois mois et était assaillie de doutes, ne se faisait plus confiance, était véritablement mal, même si, malgré tout, elle était en train de remonter le courant.

Les deux premières séances ont ciblé son ex-mari afin de lui enlever tout pouvoir sur elle (visualisation et expulsion de sa présence dans son espace intérieur). Elle était prête à faire ce travail et en a été immédiatement soulagée - transformée dès notre second entretien. Voici le rêve qu'elle m'a apporté la troisième fois :

Le rêve.

Nous sommes couchés, mon mari et moi. Il est rigide, replié sur lui-même et moi, je suis collée à lui. Tout en lui parlant, je le caresse sur le torse, sur la tête. Mes caresses se précisent, deviennent de plus en plus langoureuses, l'excitation monte et, finalement, nous faisons l'amour avec beaucoup de sentiment et d'engagement. La relation est forte, tout comme elle l'a été au début, quand on s'est rencontrés. Mais ensuite, il se rigidifie de nouveau, il se lève et me dit : "Ne me fais plus jamais un coup pareil ! Laisse-moi tranquille ! J'ai besoin de prendre du recul !" Il s'en va en colère et vexé, comme s'il s'était fait piéger. Moi, je reste couchée, surprise, avec un fort sentiment d'incompréhension car je n'ai jamais rien fait pour le piéger ou le forcer à quoi que ce soit. Réveil étonnée.

L'interprétation.

Le rêve semble parler de sa relation avec Richard, car elle a commencé ainsi : C'était un homme seul, triste, morbide, ne croyant à rien. Leur rencontre l'a transformé : Il est devenu gai, rieur, enthousiaste. "Cette relation forte, dit-elle, nous l'avons vraiment eue. Cela a été un vrai feu d'artifice - mais uniquement ici, dans ma région. Dès que j'ai été chez lui, ça s'est dégradé tout de suite. Il ne parlait plus, m'ignorait, nous avons fait chambre à part très vite, il s'est même remis à boire. Les trois derniers mois ont été très douloureux. Quand j'ai annoncé ma décision de repartir dans le midi, il n'a rien fait pour me retenir. Il a juste bu sans plus se cacher."

Toutefois, Laurence s'est bien rendu compte que la fin du rêve met en scène son propre comportement, à elle. Car c'est exactement ce qu'elle ressent : Elle s'est fait piéger et jamais, jamais plus, elle ne veut se laisser avoir comme ça ! DONC cela signifie que Richard la symbolise. Reprenons ce que lui dit son inconscient :

Tu étais repliée sur toi-même, étiolée, sans amour et, quand tu as rencontré Richard, tu as projeté sur lui tes propres désirs et tu as vécu cette histoire d'amour avec sentiment et engagement. Tu y as cru. Et puis, tu t'es rendu compte que lui, il ne pouvait te suivre. Alors, tu t'es rigidifiée de nouveau et tu t'es adressée à toi-même :

"Ne me fais plus jamais un coup pareil ! Plus jamais je ne veux me faire piéger ainsi. Dorénavant je tiendrai compte des signes."

C'est en fait un dialogue entre elle et elle. Du reste, dès le premier entretien, elle a vu apparaître une "copine" à côté d'elle, avec laquelle elle s'est mise à dialoguer. Quand je lui ai demandé son nom, elle l'a interrogée et cette copine lui a répondu : "Je m'appelle Valérie." Comme elle ne connaissait personne de ce prénom, je lui ai suggéré que cela pouvait parler de ses propres valeurs (Valérie). Or, depuis cette tourmente, elle n'arrête pas de dire que, dorénavant, elle tiendra compte des signes, des indices, de ses ressentis négatifs, et elle a déjà mis en oeuvre de nouveau comportement dans sa recherche d'un travail.

Cette explication lui convient parfaitement. Elle a pris beaucoup de recul et cette douloureuse expérience lui ouvre une nouvelle façon de vivre parce qu'elle en a tiré la leçon. "Ce qui ne nous tue pas nous rend plus fort." (Nietsche)

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