RÊVE numéro 9
La rêveuse. Il s'agit d'une femme de cinquante ans. Elle a une violente phobie des chats. Elle vient me voir pour cela car elle ne supporte plus d'être terrorisée de la sorte. Ses rêves la mettent sur la piste de sa mère. Elle m'apporte un cauchemar à la septième séance.
Le cauchemar. Nous sommes dans une très grande pièce, peut-être un dortoir. Il y a des gens allongés derrière un rideau. Mon amie Elise me dit soudain : 'Attention. Il faut faire semblant de dormir, car quelqu'un va venir pour nous tuer.' C'est très alarmant. J'entends un bruit derrière les rideaux. Je me couche sur le sol. Il y a un petit enfant près de moi. Il fait très sombre, je sens une présence, mais je ne vois pas qui c'est. Elle met sa main sur le front de l'enfant. Il est immédiatement pris de secousses et de tremblements. Je sais qu'il va mourir. Puis elle dirige sa main vers mon front. L'angoisse est insoutenable et je me réveille en hurlant.
Interprétation. La rêveuse a eu une mauvaise mère. Toutefois, en société, cette mère était en général appréciée car elle montrait un autre visage que celui de la maison. C'est très difficile, pour un enfant, de rétablir la vérité, entre deux comportements si différents. D'autant plus qu'il n'y avait aucune maltraitance sur le plan matériel. Tout était dans la manipulation, les non-dits, les affirmations haut et fort, du style : 'Je ne suis pas une mère indigne!' Eh bien si, justement. Le rêve le dit clairement (il y en a eu de nombreux autres, qui allaient tous dans le même sens). Le petit enfant symbolise la rêveuse dans le passé, lorsque sa maman la 'tuait' tout en affichant un comportement bienveillant (la main sur le front). À plus de 40 ans, elle n'est toujours pas guérie, elle se sent encore aujourd'hui sous sa domination - bien que sa mère soit morte depuis longtemps. Ecoutons-la. Son discours justifie totalement ce que dit son cauchemar.
- Devenue adulte, j'avais l'intuition que ma mère avait sur moi une influence négative et envahissante. J'avais pour elle une aversion physique telle que je ne pouvais pas la toucher. Ce que je ressentais venant d'elle ne me paraissait pas normal. Cela déclenchait chez moi des réactions violentes. Par exemple à cause de sa seule présence, je n'ai pas pu allaiter ma fille. Quand elle me regardait la mettre au sein, elle avait un regard ! J'en tremble encore... J'ai dû la mettre au biberon... Et je n'ai rien pu dire : Elle aurait soutenu que j'étais folle. Petite, je ne pouvais rien dire non plus, car je ne comprenais rien. Je ne pouvais pas me plaindre, pas protester, pas réagir, j'étais comme muselée par une sorte d'anesthésie. Cela venait du fait que je ne pouvais pas faire confiance à mon ressenti. Plus tard, ça a continué. Elle me manipulait, tout en douceur, elle avait des paroles méchantes dites gentiment, et des paroles gentilles dites méchamment. Je me demandais si j'étais folle, ou trop exigeante, ou névrosée ? Je ne savais pas et cette impossiblité à me donner une réponse claire et sûre était terriblement destructrice. Qu'est-ce qui était légitime ? Ce qu'elle disait ? Ou ce que je ressentais ? Je finissais toujours par me dire que je n'étais pas normale. J'ai encore aujourd'hui du mal à m'en départir. Je reste étonnée que quelqu'un au monde puisse avoir une influence aussi destructrice et dévastatrice. Et en plus, ce n'est pas bien de ne pas aimer sa maman ! C'est la fine fleur de la manipulation : C'est celui qui est manipulé qui se sent coupable ! C'est une maltraitance tellement subtile, qu'on se dit : Tu n'exagères pas ? Etait-elle vraiment capable de ça ? Eh bien Oui... Aujourd'hui, je suis convaincue qu'elle était mauvaise, mais toujours avec un bémol. Pour guérir définitivement, j'ai besoin de ne plus avoir le moindre doute, de ne plus lui donner la moindre excuse.
La phobie. Elle s'explique ici par un transfert. N'osant pas juger et condamner sa mère, la rêveuse a projeté ses sentiments négatifs sur les chats, qu'elle redoute d'autant plus qu'elle ne s'est jamais autorisé ses véritables ressentis vis à vis de sa génitrice. C'était plus facile de détester les chats que de reconnaître cette haine mêlée de peur comme étant ses véritables sentiments pour sa mère. La véritable phobie ne concerne qu'elle. La rêveuse est d'accord avec cette analyse.
Hypothèse à vérifier : Lorsque le travail sera achevé, la rêveuse, enfin libérée de sa mère, n'aura plus la phobie des chats.
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