LE MERYCISME.

Contenu de ce dossier.

Le mérycisme est un dysfonctionnement de la digestion qui a été repéré chez certains nourrissons, après six mois. C'est une régurgitation. Les aliments sont ramenés en bouche, et 'ruminés', puis ravalés, en partie ou en totalité.

Les manuels de psychopathologie de l'enfant affirment que le mérycisme n'a lieu que lorsque l'enfant est seul. Il est alors immobile, atone, le regard vide, étranger au monde extérieur. Tous les auteurs admettent que ce symptôme est secondaire à une carence maternelle, et que l'établissement d'une relation chaleureuse suspend ce dysfonctionnement de la digestion.

Comme toujours, les mères sont stigmatisées. Jusqu'à présent, on n'a jamais trouvé d'autre explication que leurs carences, en ce qui concerne les pathologies infantiles. Certes, cela peut être le cas. Mais pas toujours, j'en suis convaincue.

Chez l'adulte, c'est une pathologie rare de la digestion. Je vais donner ici le cas d'un homme de 40 ans. Ce dossier contient une présentation du sujet, et nos trois premiers entretiens. Je me suis attardée plus spécialement sur le troisième, avec la mise en page détaillée du rêve éveillé qui a apporté une explication à son mérycisme. Ce dysfonctionnement digestif a ensuite complètement disparu.

En conclusion, j'ai cherché à ouvrir d'autres pistes, pour essayer de comprendre comment cette pathologie peut se déclarer chez un très jeune enfant.

Les entretiens.

Séance 1. L'histoire du sujet.

Il prit rendez-vous en Janvier 2004. Victime d'une bouffée délirante quelques mois plus tôt, il était en train de se reconstruire, et partait dans une direction totalement différente. Toutefois, il avait besoin de comprendre ce qui lui était arrivé. Il me raconta tous les détails, et je lui fis part de ma première hypothèse. Dans la mesure où nous sommes deux à l'intérieur, l'autre (l'ego) a réussi à prendre le dessus lorsqu'on se retrouve en hôpital psychiatrique.

- Je sentais que j'étais deux, avant la crise, me dit-il. Je le sentais très fort.

Mon explication fondée sur l'ego, lui convenait donc parfaitement. En même temps, cela lui faisait un peu peur. Il avait eu des idées de suicide, et ne voulait pas que ça recommence. Il se demandait si une thérapie avec moi risquait de lui faire plus de mal que de bien. Comment peut-on réduire cet ego si dangereux? C'est une question légitime, à laquelle je réponds toujours que seule, l'expérience peut répondre. Lors de la première séance, on voit si le courant passe - ou non. Si le sujet ne se sent pas en confiance, il est préférable pour lui de ne pas revenir.

Nous avons parlé de son enfance. Ses parents se disputaient beaucoup et son père (décédé) était violent physiquement avec lui. Puis il m'informa, presque anecdotiquement, d'une particularité un peu bizarre.

- Je rumine, me dit-il, au sens propre. Depuis toujours. La nourriture remonte toute seule, je la remâche et la ravale. J'ai longtemps cru que tout le monde faisait pareil. Puis, un jour, en discutant avec un copain, j'ai appris que ce n'était pas le cas. Mais je ne peux pas m'en empêcher. J'en ai parlé un jour à un médecin, qui a pris des notes, mais n'a pas fait de commentaires. Je vis avec, ça ne me gêne pas.

Il ignorait le nom de sa 'maladie', et fut surpris de l'apprendre. Il avait toujours digéré ainsi, du plus loin qu'il se souvienne. C'était comme un réflexe. Je lui demandai s'il "ruminait" dans le sens de ressasser les choses.

- Non, dit-il... Enfin, oui.... Oui, c'est vrai, si je m'interroge. Je 'rumine' beaucoup, c'est-à-dire que je n'oublie pas les crasses qu'on m'a faites, même quand ça date de plusieurs années... On va dire Oui...

Il sortit de ce premier entretien, avec des réponses à certaines de ses questions, mais avec aussi la peur de reperdre la maîtrise de lui-même. Il avait envie d'essayer ma méthode (l'egostracisme), mais il avait quelques doutes sur son efficacité. Il avait lu des philosophes, était attiré par une retraite.

- Se connaître, savoir qui on est... Oui, mais on fait comment?

Grande question...

Séance 2. La demande du sujet. La réponse de son inconscient.

Il revint et me fit part de ses réflexions.

- Je ne fume plus de cannabis, me dit-il, or c'est ça qui m'a fait disjoncter. Il n'y a donc pas de raison que ça recommence. J'aimerais travailler sur l'alimentation. Je mange trop, et ne peux m'empêcher de me resservir chaque fois, même avec de bonnes résolutions.

Il avait fait un rêve.

- Je vois deux petits enfants, ce sont des monstres. Ils se déplacent, en vue de faire le mal. Ils sont le mal. Je sais qu'il faut les détruire, mais leurs parents me surveillent. Je prends un coupe-coupe, et je les tue en cachette. Mais je ressens une frousse monstrueuse. Réveil angoissé.

Cela semblait être un rêve d'ego, qui entérinait les explications que je lui avais données sur sa bouffée délirante. Il avait effectivement réussi à se débarrasser de cet ennemi qui lui voulait du mal, en sortant de sa crise, mais l'angoisse ressentie coïncidait parfaitement avec sa peur que ça recommence. Nous avons donc décidé de traiter son ego en rêve éveillé.

On ne sait jamais si l'inconscient sera d'accord ou non. L'hypothèse de travail peut être juste, mais elle peut tout aussi bien ne pas convenir. C'est l'inconscient qui en décide. Dans ce cas précis, il envoya beaucoup d'images qui le firent parler de sa mère, de son père... et de son enfance. Son rêve parlait effectivement des parents, qui étaient sans doute à la source de ses problèmes. La raison en est assez simple. L'ego reproduit des modèles qu'il a vu fonctionner très tôt. Quand les parents sont négatifs, il les garde en mémoire, et les utilise contre le sujet.

- Ma mère... Je garde un lien avec elle, mais c'est uniquement parce qu'elle est ma mère, me dit-il. Elle ne me manque pas, et je pense très peu à elle...

Basiquement, quand le cordon est coupé, on a avec ses géniteurs une bonne relation, sereine, sans dépendance et sans conflits. On ignore généralement qu'il reste un pas à franchir, lorsqu'une froideur s'est installée. Toutefois, tout est possible, et je ne peux pas savoir, mieux que le sujet, ce qu'il en est vraiment. Je me borne donc à le mettre en garde. C'est mon rôle, mais ce rôle s'arrête là. C'est à lui de décider.

Pourtant, comme la base de mon travail consiste à consulter l'inconscient, je dis souvent que je préfère croire ce que dit celui-ci, plutôt que ce que dit le rêveur, qui n'a pas forcément conscience de sa véritable situation intérieure vis-à-vis de ses parents.

Cela est d'autant plus naturel que tous les courants psy manquent de clarté sur ce sujet.

-- Quitter la maison familiale est souvent assimilé à la coupure de cordon, ce qui est faux.

-- Rompre avec eux aussi, ce qui est encore plus faux, car cela signifie qu'on a besoin de se protéger d'eux. Quand le cordon est coupé, toute crainte disparaît.

-- On confond souvent l'enfant intérieur (la véritable identité) avec celui qui reste de l'enfance (un handicap psychique).

Sans compter les thérapeutes qui affirment qu'il est impossible de couper ce terrible cordon. Ce qui prouve simplement qu'ils n'ont pas coupé le leur. Bref, j'explique tout cela assez fréquemment.

Ici, manifestement, il restait quelque chose, puisque l'inconscient envoyait des images des parents. À la fin du rêve éveillé, il vit un enfant dans son estomac, et le fit sortir de lui. Il se révéla être le petit monstre qu'il avait vu dans son rêve. Il prit un marteau pour le détruire, et cette fois, il le fit calmement, sans la moindre peur. Cela pouvait signifier que son ego avait utilisé son enfance difficile pour garder des rancunes, qu'il ruminait dans son coin quand il était petit, et qui s'étaient ensuite installées comme un trait de caractère à l'âge adulte, assorties du mérycisme - depuis toujours.

Le rôle de l'ego se borne souvent à faire croire au sujet que tout va bien, qu'il faut oublier le passé, et ne plus y penser. Cela suffit souvent à bloquer l'être humain dans son évolution personnelle. Car, si nous avons une conscience, c'est bien pour qu'elle nous serve justement, à prendre conscience des séquelles de l'enfance. Le meilleur moyen que je connaisse pour ce faire, c'est d'entrer dans l'inconscient. C'est lui qui possède toutes les réponses, ainsi que le remède à nos souffrances.

Cette séance semblait avoir fait ressurgir ce qui restait de non réglé vis-à-vis de ses parents. Il avait fait des liens, compris des choses, mis au clair certains éléments de son vécu. Il partit en se sentant plus léger.

Séance 3. Le rêve éveillé.

Lors de cet entretien, il me dit qu'il avait cessé de se resservir à table, mais que la séance précédente n'avait eu aucun impact sur son mérycisme.

- Comment imaginez-vous votre estomac ?

- Je pense, me dit-il, que j'ai une poche en plus, qui me fait digérer comme un ruminant.

C'était une remarque intéressante, qui pouvait parfaitement justifier le mérycisme. Ce terme vient d'un mot grec qui signifie rumination. En fait, il savait bien qu'il avait un estomac humain, et pourtant il avait cette idée en tête depuis longtemps. Je ne trouvai qu'une explication possible. Son ego se prenait pour un boeuf, et c'est lui qui décidait de ruminer...

Je lui proposai de visualiser son estomac, sachant que cet organe est lié à de nombreuses expressions de notre vocabulaire courant. Ne pas pouvoir digérer quelque chose, ne pas réussir à l'évacuer, ou à le vomir. Ici, l'expression était 'ruminer de vieilles rancunes.'

Après une relaxation rapide, je lui demandai d'appeler l'image de son estomac.

- Je vois la poche. Il n'y a rien dedans. Ah, si ! Je vois un taureau.

Toute image est symbolique et doit être expliquée, et toutes les pistes sont bonnes à proposer. J'avais parlé d'un boeuf, et l'inconscient semblait me suivre. Ce pouvait être l'ego. Mais je demandai si un de ses parents était du signe du taureau, ou si cet animal pouvait représenter le père. En effet, le géniteur est souvent symbolisé par un animal mâle.

- C'est bien un taureau, dit-il. Il regarde à droite. Je ne vois pas ce qui est autour.

J'insistai. Est-il votre père?

- Je ne sais pas. Il reste un taureau.

Quand l'image ne bouge pas, c'est que mon explication est fausse. J'avais proposé cette piste à cause de la violence verbale et physique du père. Je décidai d'évoquer l'ego et lui demandai si cela faisait évoluer l'image.

- Je vois un bouc, maintenant... Il devient chèvre... elle devient chevreau...

Les animaux mâle et femelle symbolisent souvent les parents, et leurs petits nous parlent de notre enfance. Par ailleurs, le chevreau pouvait faire référence au fait que le mérycisme durait depuis l'enfance. - Pouvez-vous réduire cet animal jusqu'à le faire disparaître?

- Je ne sais pas comment le réduire... Je l'égorge. Cela me rappelle un souvenir. Quand j'étais petit, derrière notre maison, on avait une chèvre et ses cabris. J'étais en primaire. On jouait avec. En fait, on les mangeait, dès qu'ils étaient assez gros.... J'ai l'impression d'avoir toujours digéré comme ça. J'ai peut-être 'ruminé' dans la mesure où mes parents étaient répressifs. Par exemple, si on n'avait pas envie de travailler le week-end, on ruminait ça, sans oser le dire.

Il est toujours intéressant pour le sujet de faire des liens entre son vécu et les images envoyées par son inconscient. Moi, je ne sais rien de sa vie. Je ne peux que le mettre sur des pistes plus ou moins pertinentes. Parfois, je n'en ai même pas besoin, quand il comprend tout seul. L'inconscient semblait dire que le problème remontait à l'enfance, et qu'il y avait des liens avec les parents. Il y en avait forcément, puisque son mérycisme était très ancien. Ceci dit, l'ego en était l'origine, mais il fallait comprendre pourquoi. Je le ramenai à son système digestif.

- Je vois une poche à gauche, et une excroissance à droite, comme un deuxième estomac. Je l'examine, mais je ne peux pas voir l'intérieur.

On ne peut corriger une image virtuelle, que si on a vraiment compris le message qu'elle véhicule. - Pouvez-vous la réduire? La supprimer? La couper?

- Ce que j'essaie de faire... Attendez... Je l'ai coupée. J'ai refermé l'entrée de la poche. Je vois maintenant une boule à part, à côté de mon estomac.

La boule évoque l'expression 'avoir les boules', peut-être liée au ressentiment qui le faisait ruminer... En tout cas, il doit s'en débarrasser.

- Oui... Je la tiens dans ma main. Je l'ouvre. C'est comme un gésier de poulet...

Tout animal symbolise l'ego, qui fonctionne à sa façon à l'intérieur de l'âme humaine. Le fonctionnement d'un animal est toujours un dysfonctionnement pour un être humain. Je lui dis de le détruire ou de le mettre à la poubelle, puis de retourner voir son estomac.

- C'est fait, dit-il. Je regarde l'estomac et l'intestin. Ils sont normaux.

Je lui propose d'imaginer qu'il boit l'eau d'une grande bouteille, et que cette eau passe dans tout son tube digestif, comme si une rivière le traversait, emportant avec elle toute trace de pollution. Cette eau vivante symbolise l'inconscient, qui remplit alors son rôle de nettoyage.

- Oui. L'eau est entrée dans un tube noir, qui s'est éclairci au fur et à mesure. Maintenant, il est devenu transparent.

Supposant que la chèvre était malgré tout liée à sa mère, je lui demandai s'il pouvait faire apparaître celle-ci. Elle arriva sans difficulté, et il se réconcilia avec elle.

- Je lui dis que je l'aime, c'est ce qui me vient spontanément. Elle m'ouvre les bras. J'ai la tête sur son épaule, je me vois de face, et elle de dos. J'ai l'impression qu'il y a longtemps que je ne l'ai plus vue, ce qui n'est pas vrai. C'est comme si je posais une valise. Je le sens bien. Je me dis que je pourrai maintenant profiter pleinement de l'amour qu'elle me donne, sans cette difficulté à s'appréhender l'un l'autre, qui a toujours été entre nous.

Je lui rappelai que, lorsqu'on se libère de ses parents, on peut avoir enfin avec eux une vraie relation d'adulte à adulte, sans conflit et sans rancune. C'est ce que j'appelle 'couper son cordon', quand le parent en question est vivant, et 'faire le deuil' quand il est mort. Je lui demandai d'appeler son père.

- Je le vois, me dit-il. Il est parti trop tôt. On commençait juste à rééquilibrer la relation. Je n'ai pas pu pleurer à sa mort, mais je l'ai fait deux ans plus tard, et ça m'a soulagé. Je suis clair par rapport à lui. Il a fait ce qu'il a pu. Il est mort d'un cancer des poumons. Je l'ai vu peu de temps avant sa fin. J'ai gardé longtemps l'image de cet homme fort, devenu fragile. Je ne reconnaissais pas l'image de mon père. Je le vois sur sa chaise-longue, dégarni, fatigué.

- Il est possible qu'un dernier pas vous reste à franchir, pour vous libérer définitivement de lui. Si c'est le cas, vous allez pouvoir lui dire au revoir. Ce serait bien qu'il vous quitte. Si vous êtes prêt, il sera d'accord. Est-ce possible?

- Oui... Je le lui dis. Je veux continuer ma vie. Il me comprend. Il me souhaite bonne chance, et il s'en va. Je le vois disparaître... Oui... La chaise-longue est vide, maintenant... Je ne vois plus rien...

- Est-ce que vous sentez que vous venez de tourner la page?

- C'est possible... Mourir, c'est ce qui pouvait lui arriver de mieux...

Il est pertinent de préciser ici que, lorsque le père meurt dans un rêve serein, c'est ce qui peut arriver de mieux au rêveur, puisque cela signifie que le pouvoir de son père est mort à l'intérieur de lui... Je le remis alors sur la piste de son ruminant.

- Je vois un dromadaire... Il n'y a pas de décor. Il est à genoux et il me regarde d'un oeil bovin.

Je risquai une traduction. - C'est votre ego. Il est à genoux, ce qui signifie qu'il ne peut plus vous manipuler. Il ne peut plus vous empêcher de digérer le passé... Il ne peut plus le ruminer à votre place, ou plutôt vous le faire ruminer... Pouvez-vous vous débarrasser de lui?

- Je le réduis et je l'écrase.... Si je le rappelle, il ne revient pas...

- Parfait... Allez revisiter votre estomac.

- C'est marrant, il se vide de noir...

- Vous êtes en train d'évacuer des comportements inconscients (=le noir). La cause de votre mérycisme en était un, et vous venez de l'identifier. Il était probablement relié à des ressentiments difficiles à digérer, que votre ego a utilisés à sa façon, animale et donc néfaste pour un être humain.

Les fonctionnements du règne animal sont inadaptés pour l'homme, c'est une lapalissade, ou plutôt cela devrait en être une. Car pour certaines personnes, trop nombreuses, à mon avis, nous sommes des animaux... C'est une grave erreur, distillée par l'ego lui-même. Il est trop content quand on le croit, car cela veut dire qu'il a gagné la partie et qu'il pense à notre place... C'est ce qui lui donne le pouvoir d'installer en nous ses raisonnements imbéciles, qui nous conduisent toujours à des actes déraisonnables, bizarres, violents ou barbares.

- Mon estomac est vide, maintenant, et il est transparent.

Nous avons terminé là-dessus.

Séance 4. Le point final.

Quinze jours après, il revint me voir.

- C'est impressionnant, me dit-il. Je ne rumine plus. Au point que je me suis demandé si j'en étais encore capable. C'était comme un défi. Est-ce que j'avais vraiment perdu cette façon de faire, même si elle était mauvaise? J'ai donc essayé une fois, et j'y suis arrivé. Mais ça ne m'intéresse plus. Je me sens débarrassé, plus léger. Je sens que ça va continuer. Du reste, je ne me jette plus sur la nourriture, et je mange beaucoup moins gras, moins sucré aussi. Je n'ai plus besoin de me remplir, comme avant. Je me rends compte que j'ai le choix. Je peux 'bouffer' si je veux, mais je peux aussi ne pas le faire. C'est un choix conscient.

D'autres problèmes ont ensuite été abordés, mais ils sortent du propos de ce dossier. En ce qui concerne le mérycisme, cela a été décisif. Le sujet n'a pas eu de récidive, et sa guérison est complète.

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Hypothèse de travail.

Le mérycisme des très jeunes enfants peut être éclairé par cette expérience. Après tout, pourquoi ne pourrait-il pas venir du fonctionnement de l'ego, à l'intérieur du bébé? Voici une explication possible.

L'ego est là, dès la naissance, prêt à s'identifier à n'importe quel animal, puisqu'il en est un lui-même. Dans l'entourage du bébé, il y a essentiellement son père et sa mère. Si l'un des deux est porteur d'un ressentiment relié à un événement qu'il rumine sans fin, il risque de projeter cela sur son enfant, de façon tout à fait inconsciente, bien entendu, car tout ce qui est inconscient est projeté. L'ego s'en empare, et le mérycisme s'installe. Normalement, en grandissant, l'enfant devient de plus en plus conscient, et donc de plus en plus humain. C'est pourquoi certains fonctionnements disparaissent d'eux-mêmes. Dans le cas cité ici, c'est resté. La prise de conscience a fait son travail, mais beaucoup plus tard.

Il est de toute façon impossible de psychanalyser un bébé. Cela n'empêche pas de lui parler, comme le faisait Françoise Dolto. Lui expliquer la situation peut ne pas lui faire de bien, mais cela ne lui fera pas de mal. En revanche, on peut proposer cela aux parents. S'ils ont effectivement un ressentiment lourd, la prise de conscience peut provoquer le retrait de la projection, ce qui peut supprimer le dysfonctionnement de l'ego.

Dans le cas que je viens d'évoquer, le grand-père paternel était une sorte de patriarche tout-puissant. Il avait hérité d'une grosse fortune, qu'il avait dilapidée dans des projets utopiques. Par exemple, il avait voulu exporter des mérinos au Mali. On ne discutait pas avec lui. Il réalisait ses projets sans consulter personne. Le rêveur avait pour ce grand-père une admiration manifeste, mais cela n'avait peut-être pas été le cas de son père. Après tout, le mérinos est un ruminant, et dans l'histoire d'une famille, ce genre de détail peut avoir un impact sur la décision de l'ego, quant à l'animal auquel il va choisir de s'identifier...

Au cours du second rêve éveillé, ce grand-père était apparu. Le rêveur l'ayant peu connu, il pouvait symboliser son père. Je lui demandai d'interroger l'image. "Qui es-tu ?" Je retranscris les paroles du sujet.

- Le visage du monstre de mon rêve ré-apparaît.... Je ré-essaie... Il me dit : Devine... et il rigole...

C'était donc bien l'ego, mais nous n'avions pas compris pourquoi à ce moment-là. J'ai le sentiment que toute l'histoire est maintenant décodée.

La psychogénéalogie. On sait que les secrets familiaux pèsent sur les générations suivantes, même et surtout si elles les ignorent. Ici, il s'agirait d'une rancoeur du père contre le grand-père, projetée sur le fils. L'origine étant un ruminant, l'ego de l'enfant le choisit comme un symbole pertinent. L'enfant n'a aucune rancune contre le grand-père, mais il a de bonnes raisons d'en avoir contre son père, ce qui fortifie le mérycisme. Il se trouve que le frère aîné était le favori des parents... ce qui en rajoute. La boucle est bouclée.

Ceci doit rester une hypothèse puisque le père n'est plus là pour la confirmer.

L'amour parental. Je suis bien entendu convaincue que l'amour des parents est susceptible de régler beaucoup de problèmes chez un enfant. Mais cet amour est trop souvent conditionnel, ce qui provoque chez l'enfant le sentiment d'être mal aimé, et facilite l'installation de l'ego.

Toutefois, même l'amour inconditionnel n'a pas de prise, lorsque l'ego de l'enfant prend la direction des opérations, comme c'est le cas pour les TOCs ou pour les Phobies (voir ce dossier dans le Menu).

Ce site a pour but de permettre à ses visiteurs de prendre conscience des interférences de l'ego dans les multiples fonctionnements de notre humanité.

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